Trois nuages sombres à l’horizon
À l’aube du quatrième trimestre, Johanna Kyrklund, CIO de Schroders, revient brièvement sur l’évolution des marchés cette année : quelles sont les tendances de marché qui se sont développées et quelles autres l’ont surprise ? Elle se projette également dans l’avenir : quels sont les nouveaux risques qu’elle voit se profiler ?
L’économie américaine résiste mieux que prévu, ce qui conforte l’opinion positive de Schroders concernant les actions. Malgré les derniers chiffres du marché du travail un peu plus mitigés, la croissance des salaires reste robuste et les licenciements sont peu nombreux. Le risque de récession aux États-Unis semble encore limité. La politique monétaire et budgétaire accommodante continuera de soutenir les actions tant que la stabilité des marchés obligataires se maintiendra.
À cet égard, l’or est la diversification préférée de Schroders. Le métal précieux protège contre les inquiétudes liées à la dette souveraine et à l’indépendance des banques centrales - exactement le rôle que l’on peut attendre de l’or.
Les rendements des actions se sont également élargis cette année. Si les États-Unis restent dominants dans le domaine de la technologie, ce sont précisément les marchés hors États-Unis qui ont attiré l’attention en raison de leur valeur relative, comme la Chine, par exemple, qui a été le marché le plus performant cette année. La diversification géographique a été utile cette année.
Trois nuages sombres
Pourtant, certaines tendances du marché commencent à s’essouffler et de nouveaux risques se profilent :
1. La bulle de l’IA
Primo, le marché boursier est de plus en plus divisé entre gagnants et perdants de l’IA, et des signes de surchauffe du marché sont visibles. Les haussiers de l’IA évoquent des dépenses d’investissement sans précédent. Dans le même temps, même les leaders de l’IA parlent de la formation d’une bulle, la technologie représentant désormais 40 % du S&P 500 et une part croissante des dépenses d’investissement dans l’IA étant financée par l’endettement.
Ce risque doit être géré au niveau des actions et les investisseurs de Schroders continuent de privilégier les « hypercalculateurs », tout en surveillant de près les dépenses d’investissement pour détecter les signes de détérioration des rendements. Cette vigilance est d’autant plus justifiée que certains de ces titres ont une pondération très importante dans l’indice.
2. Pression politique sur la Réserve fédérale
Une deuxième préoccupation concerne l’indépendance de la banque centrale américaine. La Fed a baissé ses taux en septembre et a laissé entrevoir d’autres réductions. Le président Trump a appelé à plusieurs reprises à une baisse des taux d’intérêt, et il existe un risque que la politique monétaire devienne trop accommodante. Cela pourrait raviver l’inflation en 2026, en particulier vu que les entreprises commencent à répercuter la hausse des droits de douane sur les consommateurs.
3. Viabilité de la dette publique
Enfin, la viabilité de la dette souveraine suscite de plus une inquiétude croissante. Jusqu’à présent, les taux d’intérêt ont pu être maîtrisés, mais sur la partie longue de la courbe des taux, la volatilité augmente, en particulier en France, au Royaume-Uni et au Japon. Détail notable : certaines entreprises françaises, comme LVMH, empruntent désormais à un taux inférieur à celui de l’État français. Cela en dit long sur la perception du risque et l’impact des politiques populistes sur le marché obligataire.
Constructive, mais vigilante
Investir est tout sauf simple. On perçoit des signes d’excès de confiance dans le secteur de l’IA et les incertitudes concernant la politique et la dette demeurent. Toutefois, Mme Kyrklund reste constructive concernant les actions : l’économie mondiale est en croissance et les taux d’intérêt restent bas pour l’instant. Mais elle met précisément en garde contre le fait que dans ce type de marché, il convient de rester attentif à la valorisation, au risque et à la distinction entre le battage médiatique et la valeur réelle.
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Nils Rode discute de l’importance de trouver des opportunités de rendement résilientes sur le marché actuel et des raisons pour lesquelles les marchés privés peuvent offrir une valeur relative attrayante pour certaines classes d’actifs et stratégies.
Andy Howard discute des réactions négatives à l’égard de l’investissement durable et de l’importance de faire la distinction entre les défis sociaux et les facteurs d’investissement.
Les investisseurs de l’équipe d’investissement multi-actifs font le point sur l’allocation d’actifs et leurs points de vue sur les marchés publics. Ils expliquent notamment pourquoi ils ont ajusté leur vision sur les obligations d’État et quelles sont leurs préférences en matière d’actions.
Les économistes du Schroders Economics Group ont présenté leurs prévisions de base actuelles et leurs scénarios de risque. L’inflation américaine devrait rester élevée, tandis que les risques englobent une période de faiblesse des données américaines et un affaiblissement du dollar.