Gaz russe : les plans européens sont-ils réalisables ?

Mark Lacey, responsable matières premières chez Schroders, se demande à quel point le plan ambitieux visant à permettre à l’UE de se passer du gaz russe est réalisable.

L'Europe est actuellement dépendante du gaz russe pour 35-40% de ses besoins en gaz. La guerre en Ukraine montre à quel point il est important de diversifier cette dépendance, ainsi que l'objectif à long terme de passer à des sources d'énergie propres.

Un accord avec les États-Unis sur le gaz naturel liquéfié (GNL) doit satisfaire 10% de ses besoins en gaz. Le plan à long terme prévoit la fourniture à l’UE d’environ 50 milliards de mètres cubes de gaz par an de la part des États-Unis et de partenaires internationaux. Tout cela s’inscrit dans le plan REPowerEU, qui devrait réduire de deux tiers les importations de gaz russe en Europe l'année prochaine.

Le plan REPowerEU est incroyablement ambitieux. Lacey examine cinq objectifs et les défis.

Objectif 1 : Importation de 50 milliards de m3 de GNL supplémentaires provenant de sources alternatives

Dès avant l'invasion de l'Ukraine, l'Europe souhaitait progressivement renoncer au gaz russe et importer davantage de GNL. Le marché mondial du GNL est actuellement d'environ 400 millions de tonnes par an. Il va croître d'au moins 20-25 millions de tonnes par an au cours des dix prochaines années, étant donné que les principaux marchés tels que la Chine et l'Inde augmentent leur capacité d'importation de GNL.

Une autre pierre d’achoppement est que le GNL est liquide et doit être retransformé en gaz. Les capacités dans ce domaine sont encore limitées en Europe. En outre, le réseau connaît ses limites et ne permet pas de transporter tout ce gaz supplémentaire vers les marchés qui en ont besoin, comme l'Allemagne ou l'Autriche. La bonne nouvelle, c’est que l'Europe a l'intention d'augmenter sa capacité d'importation de GNL. La mauvaise nouvelle, c’est que la construction doit encore commencer.

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Objectif 2 : Augmentation des importations de gaz non russe de 10 milliards

Qu'en est-il de l'augmentation de l'offre via des pipelines existants ? La tâche sera très ardue sans nouvelle exploration de gisements gaziers. Les champs de production tournent actuellement à plein régime. Mais ces dernières années, le développement de nouveaux gisements gaziers a été extrêmement limité.

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Objectif 3 : Réduire la demande de gaz naturel de 20 milliards de m3 par le développement de la production d’énergie renouvelable

L'accent sur l’énergie renouvelable est la solution la plus logique et la plus durable. Il s'agit cependant d'une solution à long terme et qui ne procurera pas de capacité suffisante pour remplacer 20 milliards de m3 de gaz d’ici 2023.

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Du point de vue des coûts, la production d'énergie renouvelable éolienne et solaire est déjà nettement moins chère. Vu les récentes hausses de prix du gaz et de l'électricité, l'argument des coûts est incontestable. Mais les investissements en faveur de la production d'énergie renouvelable sont nettement inférieurs à ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs fixés pour l'horizon 2030/2050. Il en va de même pour les investissements connexes nécessaires aux réseaux de transport et de distribution.

La chaîne d'approvisionnement représente un obstacle majeur, car en raison des confinements des grandes villes chinoises, l'offre de l'industrie des micro-processeurs est encore et toujours limitée, et la disponibilité de la capacité en cargo et porte-conteneurs reste très perturbée. Les restrictions dans les chaînes d'approvisionnement diminueront en 2023, mais il ne s’agit pas d’une solution rapide.

Objectif 4 : Recours à des mesures d'efficacité énergétique pour réduire la demande de 15 milliards de m3

Les trois premiers objectifs concernent tous en grande partie l'offre. Mais que peut-on faire du côté de la demande ? Diminuer le thermostat a-t-il un sens ? Les producteurs à forte intensité énergétique annoncent des fermetures d'usines à court terme en raison des prix élevés du gaz. Une analyse récente de Bloomberg suggère qu'une baisse du thermostat pourrait réduire la demande annuelle en Europe de 10% (soit environ 14 milliards de m3). La transition vers des pompes à chaleur pourrait également apporter sa pierre à l’édifice. Mais la principale pierre d’achoppement pour le consommateur demeure les coûts initiaux qui s’élèvent encore à plus du double de celui d'une chaudière conventionnelle. La situation pourrait s'améliorer au cours des cinq à dix prochaines années, au fur et à mesure de l’accroissement des volumes.

Objectif 5 : Arriver à une capacité de stockage de 80% en novembre

Le plan REPowerEU a également pour objectif de porter la capacité de stockage à 80% pour le 1er novembre 2022, et à 90% au cours de toutes les années suivantes. En soi, les services aux collectivités et les gestionnaires de stockage doivent acheter à tout prix du gaz sur le marché pendant l'été afin d’éviter un nouveau pic hivernal. Actuellement, les niveaux de stockage européens sont d'environ 25% inférieurs à la normale, mais au-dessus des niveaux les plus bas de 2018.

Tout profit pour les producteurs américains de gaz naturel

Il n'existe donc pas de solution facile pour l'Europe concernant le remplacement du gaz naturel. L'Europe est désormais très dépendante des volumes de GNL importés pour répondre à ses besoins énergétiques et le plan d'action REPowerEU accélèrera le passage à de nouveaux fournisseurs présentant un risque moindre. Les États-Unis peuvent avoir une position dominante dans ce domaine. Ils disposent d'importants stocks et ont le potentiel de devenir un grand exportateur de gaz naturel. Selon les prévisions, la majeure partie de ce gaz sera exportée vers les marchés européens. Les prix à terme pour les contrats gaziers aux États-Unis ont déjà augmenté et pourraient poursuivre leur hausse à long terme au fur et à mesure que les États-Unis deviendront un fournisseur mondial de gaz de plus en plus important. Les entreprises américaines les mieux placées pour tirer parti de cette hausse de la demande et des prix sont celles disposant de ressources bon marché et ayant un accès facile aux installations d'exportation de GNL américaines.

Lire aussi How feasible is Europe's plan to reduce reliance on Russian gas ?, par Mark Lacey, responsable matières premières chez Schroders.

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