Les mesures de stimulation feront-elles durer le conte de la croissance chinoise ?
19 juin 2020
La Chine est un des rares pays émergents à pouvoir appliquer des mesures de soutien substantielles. Au Congrès du peuple, les registres ont été ouverts à fond. Cela suffira-t-il pour prolonger le conte de la croissance ? Craig Botham, économiste des marchés émergents chez Schroders a de grandes espérances et prévoit même des effets collatéraux sur l'économie mondiale.
Entretemps, Schroders a fortement réduit les perspectives de croissance de la Chine en se fondant sur le premier trimestre catastrophique de la deuxième économie mondiale. On ne sait jamais dans quelle mesure les chiffres chinois reflètent la réalité. Il semble toutefois que, maintenant, les autorités doivent accepter l'inéluctable et communiquer avec prudence la mauvaise nouvelle. Les décideurs ont eux-mêmes abandonné les objectifs de croissance. On se dirige désormais vers une stabilité du marché de l'emploi.

Schroders table sur une croissance économique de 2,2 % en 2020, en tenant compte d'importants stimulants. Un taux de chômage de 6 % et un déficit budgétaire de 3,6 % en 2020 permettent de déterminer un objectif de croissance implicite. Il devrait légèrement dépasser 5 % en valeur nominale, ce qui représente une croissance réelle de 2 à 3 % cette année, en fonction de l'inflation.
Effets multiplicateurs
Pour y arriver, la Chine ouvre différents registres. Le déficit budgétaire peut atteindre jusqu'à 3,6 %, des dettes publiques à hauteur de 1 milliard de RMB seront émises et d'autres dettes seront émises par les pouvoirs publics locaux. En réalité, le déficit budgétaire est bien plus élevé car des fonds de réserve sont mobilisés pour prévenir un déficit plus important. Le déficit réel est estimé à 6,1 % du PIB, soit une augmentation de 1,2 point de pourcentage.
D'autre part, la dette spéciale pour les pouvoirs publics locaux a un impact économique bien plus important que le laissent suggérer les chiffres officiels. Depuis peu, les pouvoirs publics peuvent utiliser du capital pour obtenir des crédits auprès des banques, ce qui crée un effet de levier. Il s'agit d'un changement important qui laisse augurer une surprise positive dans les investissements d'infrastructures.
Davantage de souhaits
La Chine lance le plus grand paquet de stimulants de tous les marchés émergents. L'effet devrait être positif. On en attend davantage, par exemple un renforcement de la croissance des crédits, un objectif d'inflation plus élevé et de nouveaux instruments monétaires qui peuvent atteindre directement l'économie réelle.
L'infrastructure en profite
La question est de savoir où va tout cet argent. Dans les grandes lignes, Schroders identifie deux bénéficiaires de ces mesures de stimulation. Il est d’abord question de soulager les entreprises, mais la majeure partie est destinée aux infrastructures. Il n'y a guère de stimulant pour la consommation des ménages chinois. Mais c'était prévu, puisque la pandémie exerce des effets sur les dépenses de consommation qui ne peuvent être annulés par des mesures financières. Si les consommateurs ont peur d'aller dans les magasins, ils ne le feront pas davantage s’ils ont plus d'argent.

Il est donc préférable que ce soient les pouvoirs publics qui fassent couler l'argent. En le consacrant à des projets d'infrastructures, le reste de l'économie mondiale profitera de nombreux effets collatéraux positifs. Les producteurs de matières premières en sont des bénéficiaires directs. Le secteur immobilier, qui semble se préparer à un retour salubre, en profitera également.
En résumé, Schroders estime que les mesures politiques annoncées par le Congrès du peuple suffisent à maintenir la croissance chinoise et exerceront des effets positifs sur le reste du monde.
Lire aussi Can stimulus revive China’s growth story? par Craig Botham, économiste des marchés émergents chez Schroders.
