Investisseurs obligataires et durabilité : rien que du greenwashing ?

30 mars 2021

Alors que les émissions d’obligations vertes, sociales et durables devraient atteindre un montant record de 650 milliards de dollars cette année, la responsable Crédit durable de Schroders, Saida Eggerstedt, aborde le thème du greenwashing.

Selon Saida Eggerstedt, responsable Crédit durable de Schroders, « nous connaissons actuellement une phase d’essor des emprunts liés à des critères de durabilité ».

En 2020, les émissions mondiales d’obligations vertes ont atteint 226 milliards de dollars US, soutenues par les États et les entreprises à la recherche de financements en faveur d’initiatives respectueuses de l’environnement, a révélé Bloomberg. Fin 2015, ce chiffre atteignait environ 40 milliards de dollars US. Selon Moody’s Investor Service, les émissions mondiales d’obligations vertes, sociales et durables atteindront un montant record de 650 milliards de dollars US en 2021, soit une hausse de 32 % par rapport à l’année dernière.

Toutefois, bien que les obligations vertes soient clairement dans l’air du temps, il existe un consensus moins large concernant leurs définitions et les normes qui les sous-tendent (voir ci-dessous). Saida Eggerstedt déclare : « La reprise après la pandémie mondiale a alimenté cette expansion, les gouvernements du monde entier cherchant à stimuler leurs économies et à créer des emplois tout en s’engageant à atteindre des objectifs environnementaux ambitieux. »

 « Nous constatons une demande importante de la part des investisseurs institutionnels qui souhaitent atteindre leurs propres objectifs ESG et qui recherchent des rendements sur un marché obligataire mondial peu rémunérateur », explique-t-elle.

Toutefois, alors que la pandémie fait passer les obligations durables du statut d’investissement de niche à celui de placement conventionnel, elle met en garde : « L’une des craintes exprimées est que les normes de sélection d’actifs ou les objectifs de durabilité des émetteurs ne soient pas aussi élevé(e)s ou aussi strict(e)s qu’ils/elles pourraient l’être, et certaines entreprises risquent de se voir accusées de « greenwashing. »

Les obligations vertes, sociales et liées au développement durable expliquées

  • Les obligations vertes, qui concentrent l’attention jusqu’à présent, sont émises par des gouvernements et des entreprises pour financer des projets nouveaux et existants avec des avantages environnementaux tels que les projets d’énergies renouvelables et d’efficacité énergétique. Saida Eggerstedt cite GetLink, l’entreprise qui gère le tunnel sous la Manche reliant la Grande-Bretagne à l’Europe continentale, à titre d’exemple récent. L’année dernière, elle a émis des obligations vertes pour financer des projets d’énergie propre tels que des transports à faibles émissions de carbone et des parcs éoliens. « La Grande-Bretagne émettra cette année son premier emprunt d’État vert pour faire face à la crise climatique et soutenir la reprise après la pandémie. L’Allemagne, la France et les Pays-Bas font partie des pays qui ont déjà émis des obligations vertes, et la Commission européenne a déclaré en septembre dernier que 30 % du programme de relance pour l’après-crise du coronavirus de l’UE devait être financé de cette façon. » 
  • Parallèlement, les obligations sociales financent un éventail de causes allant de l’accès à l’éducation, aux moyens de transport abordables en passant par la protection de l’approvisionnement alimentaire. Selon Bloomberg, les émissions d’obligations sociales ont été multipliées par sept l’an dernier, en partie en raison des mesures de soutien prises en réponse à la pandémie de Covid-19. Saida Eggerstedt déclare : « Par exemple, suite à la pandémie, la Société financière internationale, l’institution mondiale de développement et organisation sœur de la Banque mondiale, a émis des obligations pour réduire l’impact économique sur les pays en développement ».
  • Les obligations liées au développement durable sont un sujet brûlant à l’heure actuelle. L’émetteur s’engage explicitement à l’avenir à améliorer les résultats de durabilité dans l’ensemble de l’entreprise dans un calendrier prédéfini. Par exemple, le groupe énergétique italien Enel et le producteur brésilien de pâte et de papier Suzano ont émis des obligations liant le coût du capital à leurs objectifs de décarbonation du processus de production. Saida Eggerstedt déclare : « Parmi les exemples les plus marquants figurent la marque française de luxe Chanel et le groupe de distribution britannique Tesco. Schroders a elle-même transformé sa facilité de crédit d’entreprise en une ligne liée à des critères ESG en 2019, dont les prix dépendent de la performance des objectifs de diversité, de l’intégration des investissements ESG et de l’utilisation des énergies renouvelables. » 

Existe-t-il des normes mondiales ?

« L’absence de principes mondialement reconnus est l’un des plus grands défis », explique Saida Eggerstedt.

L’International Capital Markets Association, l’organisme professionnel des investisseurs, a lancé des principes d’obligations vertes et liées au développement durable, mais il s’agit de normes volontaires qui décrivent comment les émetteurs peuvent utiliser les fonds et tenir les investisseurs informés.

De son côté, la Climate Bonds Initiative, une organisation à but non lucratif internationale, a ses propres critères et décrit son programme comme un « système de labellisation de type « commerce équitable » pour les obligations ».

La Task Force on Climate-Related Financial Disclosures contribue à uniformiser les rapports financiers liés au climat, ce qui devrait améliorer la clarté en matière d’obligations vertes.

Saida Eggerstedt déclare : « Beaucoup d’entreprises ne sont pas cotées sur l’un des principaux marchés boursiers mondiaux. Certaines d’entre elles sont de petites entreprises qui ont besoin de la gérance et de l’engagement des porteurs d’obligations pour améliorer leur transparence et leur comptabilité. Je pense que les détenteurs d’obligations ont un rôle important à jouer, parfois aux côtés de leurs homologues porteurs d’actions. »

S’il est vrai que certains marchés ont clairement une longueur d’avance sur d’autres dans leur parcours d’investissement durable, la situation n’est pas aussi tranchée, explique Saida Eggerstedt. « L’Europe figure en tête, suivie par les États-Unis et l’Asie, qui affichent une dynamique solide. C’est un pas important en vue d’atteindre les objectifs mondiaux de durabilité. Je suis agréablement surprise par les émetteurs des marchés émergents. Les obligations liées aux
Objectifs de développement durable des Nations Unies émises récemment par une entreprise brésilienne sont très avancées, et vont même jusqu’à prendre en compte des questions comme la santé mentale des collaborateurs, par exemple. » 

Poser des questions, suivre les résultats

Les investisseurs et les gestionnaires d’actifs doivent accomplir un travail en amont pour évaluer le profil et les objectifs d’un émetteur obligataire et suivre ses résultats durables.

La première obligation verte du secteur pétrolier et gazier a été émise par Repsol en mai 2017 afin de lever 500 millions d’euros. À l’époque, le géant espagnol avait avancé que le financement l’aiderait à réduire ses émissions de CO2 de 1,2 million de tonnes d’ici trois ans. Toutefois, l’émission était destinée à moderniser et à améliorer ses installations de raffinage de combustible fossile existantes. Saida Eggerstedt déclare : « L’obligation verte de Repsol doit rappeler aux investisseurs combien il est important de poser des questions sur ce qui constitue un objectif valide ou un indicateur clé de performance. Il convient également de tenir compte de la question du suivi de l’utilisation des capitaux. »

Saida Eggerstedt poursuit : « Les investisseurs doivent entreprendre un processus de due diligence et pas seulement croire sur parole les émetteurs affirmant qu’ils s’engageront à ce que le produit qu’ils reçoivent d’une obligation verte ou d’une autre obligation ESG sera utilisé uniquement pour des projets appropriés. Certains analystes craignent même que certaines entreprises ne se comportent de manière opportuniste et ne tentent d’accéder à un financement moins cher tout en attendant que des initiatives appropriées se présentent. De toute évidence, les obligations doivent être évaluées au cas par cas. »

Saida Eggenstedt

Contact presse

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Press and media relations, BeFirm

Tânia Jerónimo Cabral

Head of Marketing Schroders Benelux, Schroders

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