Cinq points à retenir sur les avantages et les risques potentiels auxquels sont confrontés les investisseurs en actions mondiales

Simon Webber, responsable de la gestion Actions mondiales chez Schroders, évoque en quoi l’accroissement de l’ampleur et de la volatilité des marchés dans le contexte d’une économie résiliente est susceptible de créer des opportunités pour les investisseurs en actions mondiales.

Un atterrissage en douceur de l’économie américaine reste notre scénario central et nous pensons que les places boursières seront soutenues à moyen terme par une croissance modeste des bénéfices des entreprises. En Europe, l’inflation reste sur une trajectoire nettement baissière alors que la zone euro et le Royaume-Uni sont sortis de récessions peu prononcées.

Cela a permis à la Banque centrale européenne et à la Banque d’Angleterre de commencer à réduire leurs taux d’intérêt. Des économies comme le Royaume-Uni et l’Espagne présentent une part élevée de prêts immobiliers à taux variable et une baisse des taux d’intérêt apportera un soutien immédiat aux consommateurs. Nous constatons également une croissance plus élevée des salaires réels en Europe et au Royaume-Uni, ce qui, combiné à une épargne excédentaire, devrait également soutenir la croissance de la consommation.

La correction boursière survenue en août a entraîné une dévalorisation des actions en reflet des perspectives plus incertaines de l’économie américaine, mais ces dernières ont rapidement gommé leurs pertes, soutenues par une solide croissance des bénéfices et les perspectives d’assouplissement des conditions monétaires. Les marchés actions étaient susceptibles de connaître une correction après neuf mois de forte hausse, mais les fondamentaux des entreprises sont relativement favorables et la volatilité accrue crée des opportunités de repositionnement en cas de bouleversements.

1. Les valorisations globales continuent de favoriser les marchés en dehors des États-Unis

Sur la base des indicateurs couramment utilisées, le Royaume-Uni reste l’un des marchés offrant les valorisations les plus attrayantes d’un point de vue historique. Les valorisations des places boursières mondiales continuent de plaider en faveur des marchés hors États-Unis, en particulier le Royaume-Uni, le Japon et les marchés émergents (voir tableau ci-dessous).

Cependant, les valorisations sur le marché américain semblent moins exigeantes si l’on regarde au-delà des valeurs de croissance à méga-capitalisations de la « Big Tech », qui tirent vers le haut le PER global de l’indice S&P 500. Dans l’ensemble, les grandes valeurs technologiques ont bénéficié à la fois d’expositions thématiques pertinentes et de solides fondamentaux. En revanche, le reste du marché est confronté à un environnement opérationnel qui reste difficile, ce qui a freiné la croissance des chiffres d’affaires et des résultats nets une grande partie de cette période.

2. Possibilité d’élargissement du groupe des valeurs dominantes, créant des opportunités pour les investisseurs actifs

L’ampleur du marché est restée extrêmement faible ces douze derniers mois, sachant qu’un ensemble restreint d’actions a représenté la grande majorité des gains du marché. L’étroitesse des marchés à ce jour a été fonction à la fois de facteurs « top-down » – la thématique de l’IA – et de fondamentaux « bottom-up », représentés par une croissance divergente des chiffres d’affaires et des bénéfices.

Le consensus table désormais sur une certaine réduction de cet écart, et anticipe une accélération de la croissance des bénéfices pour l’ensemble du marché et une décélération significative pour le groupe composé des acteurs de la « Big Tech » (voir le graphique ci-dessous). Les méga-capitalisations technologiques américaines ont affiché une très forte croissance de leurs bénéfices ces 18 derniers mois, grâce à une maîtrise des coûts renouvelée et à une croissance soutenue de leurs recettes.

Les avantages issus de cette maîtrise des coûts devraient toutefois s’estomper ces prochains trimestres, ce qui rapprochera la croissance des bénéfices du reste du marché. Dans l’ensemble, ces entreprises restent soutenues par d’excellentes activités et des fondamentaux solides, mais elles sont vulnérables à l’asymétrie baissière des chiffres d’affaires et des bénéfices par rapport au reste du marché.

Il y a également lieu de tabler sur un élargissement des performances des marchés actions au plan régional. Les économies européennes seront plus sensibles à la réduction des taux d’intérêt que l’économie américaine et, au Japon, les salaires réels repartent à la hausse après de nombreux mois de contraction. L’Europe et le Royaume-Uni, par exemple, ont renoué avec une croissance positive du PIB plus tôt cette année, après une période de croissance plus faible et de ralentissement plus prolongé des bénéfices.

Ces régions devraient être davantage soutenues par la baisse des taux d’intérêt. Les consommateurs européens, en particulier, sont davantage exposés aux prêts immobiliers à taux variable (par rapport aux États-Unis) et les entreprises européennes sont plus tributaires de prêts bancaires. En revanche, aux États-Unis, le discours est passé de la maîtrise de l’inflation à l’évitement d’une récession. Une récession aux États-Unis n’est pas notre scénario de base, mais il existe un potentiel de rattrapage dans certaines régions.

3. Les entreprises japonaises restent en bonne posture pour distribuer des liquidités aux actionnaires

Nous continuons d’observer une amélioration mésestimée des bénéfices, ce qui devrait continuer à soutenir les actions japonaises. Trois décennies de déflation ont conduit les entreprises et les particuliers à accumuler leur argent.

Des réformes sont actuellement en cours, sous l’impulsion de la Bourse de Tokyo et de divers organismes gouvernementaux, lesquelles visent à améliorer la gouvernance et l’efficience du capital. Ces réformes sont introduites parallèlement à des incitations telles que le régime d’investissement exonéré d’impôt (NISA) pour les particuliers. De telles initiatives devraient contribuer à faire fructifier les liquidités excédentaires et à accroître un taux de détention d’actions exceptionnellement bas par rapport aux autres marchés développés.

En conséquence, une plus grande attention est portée à la rémunération des actionnaires et nous constatons un accroissement des investissements et des dépenses en capital. Ce regain d’intérêt pour la productivité et la rentabilité est également soutenu par une normalisation de l’inflation qui conduit la Banque du Japon à abandonner sa politique de contrôle de la courbe des taux au moment même où la plupart des banques centrales s’orientent vers un assouplissement.

Ces conditions devraient apporter un soutien plus important au yen, qui a érodé les rendements des investisseurs étrangers la majeure partie de la dernière décennie. Dès lors, nous devrions déceler un nombre accru d’opportunités attrayantes parmi les entreprises axées sur le marché intérieur.

4. Élections américaines : la volatilité est susceptible d’augmenter, mais les fondamentaux priment

Le calendrier politique a été particulièrement chargé en 2024. Plus de 40 pays, représentant les trois quarts de l’univers d’investissement mondial, ont connu ou s’apprêtent à connaître des élections nationales. Les élections américaines de novembre restent l’une des plus attendues, avec une issue qui pourrait avoir un impact significatif sur les relations géopolitiques.

D’une manière générale, il reste difficile de faire la distinction entre la politique prônée par les candidats démocrate et républicain dans des domaines clés, et une plus grande clarté à cet égard pourrait contribuer à accroître la volatilité à court terme plutôt qu’à la réduire. Cela étant, là où les différences sont apparentes – droits de douane, politique énergétique, déréglementation des banques, prix des médicaments – les implications nous semblent évidentes. Dans les deux scénarios, nous anticipons des politiques commerciales visant à réaligner les relations des États-Unis au détriment de leurs rivaux et à privilégier le renforcement du leadership américain dans les industries de pointe.

L’expérience passée montre que positionner les portefeuilles en fonction du candidat jugé voué à remporter une élection est presque toujours une stratégie perdante, et il importe à tout moment de diversifier les risques. Naturellement, il ne faut pas en déduire que nous passons outre les risques politiques éventuels, mais nous jugeons plus important de rester concentrés sur les perspectives de l’économie, l’orientation des taux d’intérêt, les prévisions de croissance des bénéfices et l’attrait relatif des valorisations.

Au sein de nos portefeuilles, nous privilégions les entreprises maîtresses de leur destin. À cette fin, nous avons fait de notre mieux pour réduire au minimum notre exposition à certaines de celles les plus exposées au risque politique.

5. Surveillance accrue de la monétisation de l’IA

L’enthousiasme entourant l’IA générative a été l’un des principaux moteurs de la hausse du cours des actions sur les marchés ces douze derniers mois. Les investisseurs se sont rués sur certains des bénéficiaires évidents des segments technologiques des semi-conducteurs et des centres de données.

Cependant, les recettes tirées de l’IA s’établissent à un niveau jugé être 10 fois inférieur au montant des investissement actuellement réalisés. Dès lors, des doutes entourent la question de savoir si les revenus attendus à court terme seront suffisants pour justifier le rythme actuel de construction d’infrastructures. Ces incertitudes sont l’une des raisons expliquant que les grandes entreprises technologiques ont été les plus touchées par la baisse du marché américain à l’occasion de la correction des places boursières intervenue en août. La capacité de ces entreprises technologiques à monétiser leurs investissements dans l’IA restera un thème important.

Nous sommes pleinement conscients que l’IA générative n’en est qu’à ses débuts et que le développement de cette technologie recèle un énorme potentiel de transformation des entreprises et de la productivité. Cependant, elle fait désormais l’objet d’un examen plus minutieux en ce qui concerne le niveau de consommation d’énergie, les contraintes d’approvisionnement et le rythme de croissance des revenus. D’aucuns s’interrogent également sur le risque d’un développement excessif susceptible de nécessiter une phase de consolidation pour les actions liées aux infrastructures d’IA.

Pour en savoir plus : Five takeaways on the potential rewards and risks facing global equity investors

Simon Webber
Simon Webber

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